À la veille de la course d’endurance des 24 Heures de Fuji (deuxième manche des ENEOS Super Taikyu Series Powered by Hankook), Kenji Momota rencontre Ikuo Maeda et discute de sa passion pour les sports mécaniques, la musique et de son ambition de faire du Japon un leader mondial du design.
Avant le départ de la course préliminaire des 24 Heures d’endurance de Fuji. Comment vous sentez-vous?
Étant chef d’équipe et pilote, je suis plutôt nerveux. La course est longue et on ne sait jamais ce qui va se passer. Mais je suis aussi impatient. Je crois que je suis à la fois nerveux et impatient.
Un ingénieur en moteurs diesel m’a dit qu’il avait été surpris d’entendre son patron évoquer Mazda Spirit Racing à la fin octobre l’an dernier.
Oui, cela a été une surprise pour les ingénieurs, d’autant plus que nous participons tout d’un coup à une compétition japonaise de haut niveau. Toutefois, je me prépare à cela depuis 2019. Je voulais vraiment bâtir une équipe qui puisse participer à la série Super Taikyu, et sur mon temps libre, j’avais commencé à y participer en tant que pilote. C’est ainsi que j’ai acquis de l’expérience en matière de course et que j’ai appris à gérer une équipe.
Vous vous sentez donc parfaitement préparé?
J’ai dessiné le logo de Mazda Spirit Racing il y a deux ans et j’élaborais des plans de développement de la marque. Mais quelque chose d’inattendu s’est produit.
Vous parlez des changements de mode de vie dus à la neutralité carbone et au COVID‑19?
C’est cela. Les constructeurs automobiles participent désormais à la catégorie ST-Q, créée pour tester la prochaine génération de véhicules en vue d’un avenir carbone neutre. Dans ce contexte, j’estime que le sport automobile en général doit également évoluer.
Pensez-vous que ce changement pourrait être porté par l’ingénierie?
Non, c’est plutôt que les constructeurs automobiles font partie du « Team Japan », unis dans la conviction que les sports mécaniques, en tant que culture, doivent contribuer à mobiliser la société dans son ensemble. C’est pourquoi nos relations avec les autres constructeurs sont bien plus étroites qu’auparavant. Les choses que nous pouvons faire en tant qu’équipe, nous les faisons ensemble, tout en cherchant à maximiser nos propres points forts. J’ai le sentiment que ce type de nouvelle relation est en train d’émerger, ce que je n’avais jamais imaginé.
À la base, les sports mécaniques représentaient l’apogée de la construction automobile. Mais ils étaient aussi critiqués pour leur indulgence et leur impact sur l’environnement. Certains exigent depuis longtemps que ces sports existent de manière plus harmonieuse dans une nouvelle société. Est-on sur le bon chemin?
Je crois que la représentation n’a toujours pas changé. Cette nouvelle initiative a démarré comme un terrain d’essai pour les nouvelles technologies, afin que les sports mécaniques puissent coexister avec une nouvelle société.
Quand avez-vous commencé à vous intéresser aux sports mécaniques ?
Lors de ma deuxième année d’université, j’ai participé à un rallye régional. Je conduisais alors une RX‑7 de première génération. J’ai rejoint Mazda en 1982, à la planification des produits. J’ai ensuite travaillé au studio de conception aux États-Unis, où j’ai participé au gymkhana SCCA Solo2 à grande vitesse avec la Familia 4WD. De retour au Japon, j’ai piloté la MX‑5 (NA) de première génération dans des épreuves de gymkhana et j’ai commencé à m’intéresser à la compétition.
Vous êtes donc passionné de sports mécaniques?
Oui, bien sûr. J’ai toujours participé aux sports mécaniques. J’ai couru dans de nombreuses catégories, j’ai participé à la Roadster Party Race (note : compétition de MX‑5) il y a environ 10 ans, et désormais, je cours en série Super Taikyu. J’aime l’atmosphère unique et tendue. Il y a tant de choses à apprendre sur la technique de conduite, on n’a jamais fini d’apprendre. Je pense que c’est ce qui me motive. Tout en travaillant dur, je me suis aussi fait beaucoup de nouveaux amis.
Avez-vous connu des déconvenues en tant que pilote?
Oui, lorsque je perds une course. Lors de la Roadster Party Race (note : compétition de MX‑5) il y a quelques années, je m’étais qualifié en pole position et je menais la course, mais vers la fin j’ai raté une vitesse et j’ai terminé troisième. Il y a bien des frustrations, et on est déçu, mais c’est toujours un combat personnel.
En dehors de la compétition, quelle est votre Mazda préférée?
Je dois dire que mes préférées sont celles qui ont présenté un défi lors de leur conception : le Roadster ND (note : MX‑5 en dehors du Japon), Mazda3 Sport, et Mazda6. Pour ce qui est des plus anciennes, j’aime la RX‑7 (FD) de troisième génération et le coupé Luce rotatif.
Quel genre de musique écoutez-vous au volant?
J’aime le piano jazz, comme Bill Evans et Makoto Ozone. J’aime la musique qui a une âme.
Est-ce qu’il y a un lien avec le Kodo?
Oui, je le pense. Je sens l’âme de la musique.
Vos sensibilités se traduisent dans le design Mazda. Comment décririez-vous Mazda en trois mots?
Magnifique. Amour des voitures. Sérieux.
Je vois que chez Mazda, chacun aborde tout avec beaucoup de sérieux. Pourquoi?
Nous n’aimons pas le compromis. Pour le meilleur ou pour le pire, nous sommes un groupe qui recherche toujours l’idéal. En matière de design, au lieu de suivre la tendance, nous recherchons notre forme idéale de beauté. C’est peut-être parce que l’esprit d’Hiroshima affiche une grande force et une détermination.
Pour finir, quelles sont vos ambitions?
Tout d’abord, je veux poursuivre les activités du Mazda Spirit Racing à long terme. Je veux qu’on soit heureux de faire partie de Mazda Spirit Racing et placer les courses de base au cœur de l’action. Une marque ne devient une marque que lorsque la société l’apprécie. C’est mon objectif actuel. En outre, je veux développer les valeurs de notre marque et toucher davantage de public en élargissant notre champ d’action aux produits grâce à nos capacités de conception. En conséquence, nous créons une « culture de l’automobile » avec les sports mécaniques au cœur. C’est mon rêve, mon ambition.
Entretien Kenji Momota